Maybe some answers? Feat Alice Locke

Même si je le voulais, je ne pourrais pas dire dans quel état d'esprit je me trouve alors que je me rends chez Dakota. Je suis encore sous le choc, j'ai des tonnes de questions, je ne sais plus qui, ou plutôt ce que je suis. Bref, je n'ai plus aucun repère. Un monde parallèle. Des papas qui ne sont pas mes papas. Des monstres, démons, vampires, dieux et je ne sais quoi d'autre. Moi qui me transforme en renarde. La fin du monde... Ok, j'ai ptet de bonnes raisons d'être morte de trouille. J'ai même fais une crise d'angoisse ce matin en me réveillant. Je n'arrivais plus à respirer, j'avais le cœur qui battait la chamade, et le plus étrange c'est que je ne me souviens pas de mes rêves. Je m'attendais à ne pas dormir, ou à faire des cauchemars, mais non. Rien. J'ai dormi 10 heures du suite, sans même bouger d'un pouce. Mais le réveil m'a vite ramené à la réalité. J'ai beaucoup pleuré. Mais maintenant ça suffit. Je dois savoir. Comprendre. Agir. Je ne peux pas me laisser aller, je ne peux pas abandonner. Du coup je ne peux pas me laisser aller à pleurer, parce que je n'arrêterai jamais et je finirai dépressive et ça m'avancera à rien. Je regarde les gens autour autour de moi, entassé dans le métro. Ils ne sont pas de mon monde. Ils sont là, alors que des monstres se baladent partout. Si ça se trouve, ce sont eux-mêmes des monstres. Oooooh flûte flûte flûte, je commence à hyper ventiler. Je regarde autour de moi, nerveuse, le cœur battant. A la station suivante, je sors de la rame comme une fusée et me précipite à l'air libre. Je prends le temps de me calmer, tentant de me raisonner moi même. Je regarde autour de moi. Je suis à 20 minutes de chez Dakota. Je peux y aller en marchant.
Je m'arrête sur le chemin dans une petite épicerie de quartier et achète une boîte de guimauves au chocolat et des mini cupcakes. Quitte a débarquer à l'heure du goûter, autant ne pas venir les mains vide. Attends.... Peut être que dans ce monde ça existe pas les goûters ? Et ben je m'en fiche ! Je viens d'apprendre que je suis un monstre renard d'une autre dimension, j'ai le droit à un goûter ! D'autant plus que je ne sais pas à quand remonte mon dernier repas. J'attrape une pomme au passage, et une fois mes achats payés je marche d'un pas vif jusqu'à l'adresse que m'a indiqué Dakota en mastiquant mon fruit.

Je ralenti le pas dès que je vois la plage. J'y venais souvent avant, j'adore le bruit de l'eau, le sable, le soleil sur la peau... Je n'y ai pourtant pas mis les pieds depuis que je suis arrivée ici. Je le regrette maintenant, et me promets à moi même de venir régulièrement. Alors que j'arrive sur devant la porte de Dakota, je suis surprise de voir que ce n'est pas lui qui m'ouvre, mais un grand roux qui me souhaite la bienvenue en m'appelant par mon prénom. J'ai un mouvement de recul involontaire. Il n'a pas l'air méchant ni rien, mais je ne savais pas qu'il y aurait d'autres personnes, et celles que Dakota a ramenées chez moi n'étaient pas des plus agréables. Je n'ai pas envie de m'enfermer dans la maison d'un quasi inconnu avec de parfaits inconnus, y'a trop d'inconnues dans l'équation. Je me tiens alors devant le monsieur qui m'a invité à entrer, la bouche ouverte, ne sachant comment refuser poliment, et me sentant infiniment stupide, et c'est alors qu'il me propose de m'installer à l'extérieur sur le sable. Le soulagement déferle sur moi, et je le suis après un hochement de tête. Nous faisons le tour de la maison et arrivons à un salon d'extérieur. Je me tourne alors vers l'océan et inspire à plein poumons. Le monsieur m' invite à m'asseoir et disparaît à l'intérieur de maison, me laissant seule à l'extérieur. Je pose les gâteaux sur la table, me sentant encore plus stupide, et m'assieds de façon à ne pas être coincée par mes voisins si je veux déguerpir, et à pouvoir avoir un œil sur la maison et la plage. Je me sens nerveuse. Je vendrais mon âme pour une tasse de chocolat chaud bien corsé avec une couche de chantilly. Pour un câlin de mes papas. Pour enfin comprendre ce qui se passe et agir en conséquence. Il n'y a rien de pire que de ne pas savoir. Ils disent que je ne retrouverai jamais mon monde, mais qu'est ce qu'ils en savent hein ? Pourquoi ?

Mes pensées sont interrompues par une tasse qui apparaît devant mon champs de vision. Une tasse de chocolat chaud rehaussé de chantilly. Je la contemple la bouche entrouverte, clignant des yeux ébahis. C'est alors que Dakota nous rejoins et me le présente. Honteuse, je me rends compte que je n'ai même pas adressé la parole au monsieur. Enfin à Jack. Je me sens rougir, et j'ai envie de disparaître dans un trou. En même temps, je suis intriguée. Il m'a apporté un chocolat chaud sans que je ne lui demande. Comment il a su, il lit dans mes pensées ou quoi ?

Ou quoi.

Je le regarde, les yeux écarquillés. Eeeeeet meeeeerde. Tandis qu'il se met à rire, je gémis et me cache le visage dans les mains.

Oh la honte...

Allé Alice, surtout ne pense pas à des trucs bizarres, garde un peu de dignité. J'écarte mes doigts de mon œil droit et regarde Dakota et Jack alternativement.

Euh.... Bonjour ? J'ai cupcake un goûter.... Je veux dire... Oh seigneur...

Je resserre mes doigts pour ne plus voir personne, morte de honte. Je savais bien que j'étais sur les nerfs, mais quand même....

Mon embarras se transforme en un mélange de sidération, de consternation et d'amusement. Soit je suis contagieuse, soit je n'ai rien à lui envier, et en ce cas il faut vraiment pas qu'on nous enferme ensemble dans un magasin de cristal. Tandis que le grand roux se tord de rire, je reste là, toute gênée, et ce n'est qu'après un petit moment que j'esquisse un sourire compatissant. Cependant, pour ne pas en rajouter à sa gêne, je détourne le regard et ne reluque pas Dakota torse nu. Les deux hommes nettoient rapidement les dégâts et disparaissent, l'un pour se changer, l'autre pour se refaire du thé. Je me lève alors et, ma tasse de chocolat chaud miraculeusement intacte à la main, et m'avance de quelques pas dans le sable. La plage est calme, il n'y a qu'un homme qui est au téléphone et qui, il me semble, me jette des regards curieux. Mais il s'éloigne d'une démarche nonchalante, et mes yeux se perdent dans les vagues. Je bois mon chocolat et retourne m'asseoir quand j'entends Dakota revenir. Il me remercie pour les cupecakes, et cette fois ci je ne me sens pas rougir.

Je t'en prie. Désolée pour tout à l'heure, j'étais... Je suis un peu nerveuse.

Je lui adresse un sourire contrit, et j'enchaîne

J'ai des tonnes de questions, et elles en entraînent d'autres. Mais mince, je suis dans un monde parallèle et je me transforme en renard. Est-ce que c'est habituel pour toi comme situation ?

C'est vrai quoi, il n'a pas eu l'air plus désorienté que ça. C'est rassurant, mais c'est aussi encore plus flippant. On est vraiment loin du pays des Merveilles! Et ce type est vachement rassurant, il a l' air de gérer. Et surtout sa maladresse fais de lui le premier vrai humain que j'ai l'impression de rencontrer. Un gars normal, mais qui a un petit plus : il fait partie d'une espèce de.... Bande ? Quoi qu'il en soit, cet homme faisait des recherches très poussées, il sait plein de choses et j'ai eu l'impression que ses "amis" et lui n'étaient pas d'accord à mon sujet. Je ne veux pas qu'il ait d'ennuis à cause de moi. Et je ne veux pas énerver le grand blond et sa meuf. Ils sont terrifiants. Du coup, je sais que c'est sûrement la dernière fois que je le vois. Alors je dois savoir.

Écoute, je sais que je ne suis qu'une petite jeune que tu connais à peine, et j' ai compris que tu es quelqu'un d'important. J'ai aussi compris que malgré ton air de gendre parfait tu fréquentes des gens dangereux. Et différents. Et moi je ne veux pas causer d'ennuis. Alors je ne vais pas t'embêter longtemps. Si je suis venue c'est que je... Euuuh...ton "ami" à parlé d'un livre l'autre jour, qui pourrait m'aider. Est ce que je peux le voir ? Le... Lire? Je ne te dérangerai pas, je me ferai toute petite dans un coin promis tu ne m'entendra même pas respirer. Enfin sauf si j'ai des questions. Mais je ne te poserai que les plus importantes promis. Mais j'ai besoin de réponses. J'ai besoin de trouver un sens à tout ça. A... Moi.

Quand il me dit que sa sœur et son psychomec ne sont pas "méchants" mais "maladroits" je retiens un petit rire sceptique. Ben voyons, et moi j'suis Lady Gaga. Il me répète que les trucs étranges c'est son rayon, et ça, ça me rassure un peu. Sensation fugace vite remplacée par une accélération de mon rythme cardiaque et une légère montée de malaise quand il me rappelle que les dieux foulent la terre. Ouais je sais, visiblement celui de la guerre est gardien de nuit et celui de la mort est à la tête du département de langues anciennes de la faculté. Y a de quoi se sentir dépassé. Il tente de nouveau de me rassurer quant à sa sœur et au grand blond, mais quand il les qualifie de "surprotecteurs", je hausse un sourcil incrédule. Comme si j'allais gober ça. C'est alors que mon attention est attirée par le télépathe qui lâche un bouquin sur la table.

À partir de ce moment, je me retrouve dans une bulle de silence, comme si mes oreilles se bouchaient soudainement. Mon regard est inexorablement attiré par le livre. Le renard sur la couverture de cuir s'anime. Sa fourrure ondule comme balayée par le vent qui se lève soudainement. J'avance ma main vers le livre, inconsciente de ce qui m'entoure, complètement fascinée. Un grand calme m'envahit alors que je caresse le renard du bout des doigts. A ce geste, je sens un immense frisson me parcourir toute entière, et je vois, partant de mes doigts et remontant jusqu'à mes épaules, comme une vague rousse et noire parcourir ma peau. J'enlève ma main du livre et la porte à mes lèvres, l'autre s'étant posée au bas de ma gorge. Au fond de mon ventre, je sens une douce chaleur qui me vient de je ne sais où. Elle m'aide à dépasser ma surprise et je retend la main vers le livre. Qui s'ouvre tout seul. Je sursaute, mais ne retire pas ma main, au contraire, je la pose sur le livre et le rapproche de moi. Il est chaud. Enfin non, il est.... Chaleureux. J'effleure le seul mot inscrit sur la page de garde. Kitsune. Je le lis comme un murmure, et c'est comme si ce mot chuchoté à mon âme répondait à toutes mes attentes, à défaut de mes questions. Ce livre, c'est mes réponses. Je le referme délicatement, et pose une main possessive sur sa couverture. C'est alors que mes oreilles se débouchent.

Bouchée bée, je me rends compte que je suis au centre d'une tornade de sable. Qu'est ce que c'est que ces conneries ? J'ouvre de grands yeux et me lève d'un bond, faisant glisser le livre sur le sol. Le sable retombe d'un coup, brutalement, comme si la tornade se mettait sur pause et que pas un seul souffle de vent n'avait jamais soulevé un seul grain de sable. Je cligne des yeux, ébahie. Il n'y a pas de sable sur la table, ni sur les gâteaux.

Euh... J'ai rêvé ou y'avait du sable autour de moi ? Il c'est passé quoi là ?

Je regarde Dakota, les yeux grands ouverts, un peu sonnée. J'ai l'impression d'avoir été foudroyée sans le sentir mais de déborder d'énergie. Je sens ce courant chaud en moi courir dans mes veines. Je ne crois pas que ce soit quelque chose de "mauvais". J'ai l'impression que ce quelque chose est un cadeau. Une bonne chose. Ce qui coule en moi n'est pas négatif, je crois que c'est simplement différent. Maintenant, faudrait que je comprenne de quoi il s'agit. Et pour ça, je n'ai qu'à lire ce livre. Que je tiens dans ma main. Quand est ce que je l'ai ramassé ? Je crois que Dakota m'a parlé, j'ai entendu cette fois, mais je n'ai pas compris un traître mot. J'aimerai pouvoir lui expliquer ce qui m'arrive, cette certitude que tout va bien se passer qui m'habite à présent. Mais tout ce qui sort de ma bouche, c'est :

Hein?

Quand Dakota me fait comprendre qu'il ne comprend pas plus que moi ce qu'il se passe, je me laisse tomber sur ma chaise, dépitée, en serrant le livre contre moi. Le grand télépathe annonce alors que je suis une kitsune. C'est bien, mais ça m'avance à rien, j viens de le lire. Ah d'accord, il m'a entendu. Je me demande comment marche son pouvoir. Est ce qu'il écoute ce que je pense ou est ce qu'il a accès à tout ce qu'il y a dans ma tête? Si oui, il pourrait ptet m'aider à me souvenir d'où est ce que j'ai mis ma tasse thermos, mon devoir de latin à rendre après demain, mon livre sur les runes et mes chaussettes Hello Kitty. Il me regarde avec un sourire et me fait signe de la tête que non. Dommage, il aurait pu faire fortune comme retrouveur d'objets perdus. A son bras il y a la plus belle femme que je n'ai jamais vu. Je la regarde, méfiante, m'attendant presque à me faire envoyer balader, mais je suis subjuguée par elle. Elle a air tellement gentille, tellement aimante, et en même temps tellement forte et courageuse. Quand je serai grande, je veux être comme elle. Elle dégage une aura de confiance, de puissance tranquille, de bien-être et de sympathie qui est presque enivrante. Elle s'assoit à côté de moi, et me saisi la main en me parlant de ma mère et de ma lignée. Et ça y est, je suis encore larguée. Pourquoi elle me parle de ma mère ? Je serre encore plus fort le livre sur ma poitrine, sentant des larmes me monter aux yeux. Dakota tente de me rassurer, et je lui souris vaillamment. Je regarde alors la femme a côté de moi.

Ne vous en faites pas. Ce n'est rien. Je n'ai jamais connu ma mère. J'ignore qui elle était. J'avais à peine quelques jours quand j'ai été adoptée. Mes papas ne m'ont jamais vraiment expliqué d'où je venais ni les circonstances de mon adoption. Mais peut être que les papas de la Alice d'ici pourront me le dire. Oooh, peut être même qu'on pourrait trouver ma mère d'ici ? Après tout on a la même.

Je suis tellement reconnaissante à mon cerveau de ne pas être tombé en panne à cause des émotions successives. J'aime ça. Avoir des plans, des objectifs, ne pas subir les choses, mais être active.

Ne vous en faites pas pour moi. Et puis tu as raison Dakota, peut être que ce livre m'aidera. En tout cas, il me fait un drôle d'effet. Comme s'il était à moi, et qu'il le savait ! Comme si il était... Content d'être avec moi. Je sais c'est ridicule, c'est sans doute mon imagination. Mais ce vent... C'est pas la première fois qu'il me joue des tours. Par contre, c'est la première fois que j'ai peur qu'il m'emmène au pays d'Oz. Pourquoi il se met à souffler comme ça ?

Je les regarde et lis dans leur regard une réponse que je ne veux pas entendre.

Ça peut pas venir de moi, j'suis pas un moulin. Le livre doit être magique

Pour prouver mes dires, j'ouvre le livre, et... rien ne se passe.

Il doit être déchargé ?

Je les regarde encore, et gigote, mal à l'aise, sur ma chaise. Mes yeux sont inexorablement attirés par le livre et tombent sur une illustration représentant un magnifique renard blanc avec bien plus de queues qu'il n'est biologiquement possible. On dirait ces illustrations qui représentent des femmes avec un kimono sous une ombrelles, ce dessin transpire l'Asie. Bon, ce n'est pas une énorme surprise ceci dit, je n'ai jamais soupçonné avoir une maman suédoise. Le seul hic, c'est que je n'y connais rien moi à cette culture. Je dois me renseigner sur leur folklore. Surtout si je dois avoir une tripotée de queues qui vont pousser. Seigneur, moi aussi je suis une créature surnaturelle. J'suis ptet un monstre. Pourtant je n'arrive pas à voir le mal dans cette image, je ne pense toujours pas être mauvaise. Je dois en savoir plus... Alors c'est simple. Je dois parler aux papas de l'autre Alice, lire ce livre, et faire des recherches supplémentaires. Et pour ça il me faudrait un coup de pouce.

Est ce que je pourrai profiter de ton accès aux livres qui me sont interdits à la bibliothèque ? Je vais avoir une tonne de recherches à faire et je ne veux pas t'embêter encore plus que je ne le fais déjà mais si tu pouvais, je ne sais pas, leur donner mon nom par exemple ? Promis après je ne t'embêterai plus.

Ma liste de choses à faire s'allonge à n'en plus finir. Découvrir ce que je suis. Et retrouver mes papas. J'ai toujours l'espoir, malgré ce que m'a dit Dakota l'autre jour, de trouver un moyen de rentrer chez moi. C'est un monde où la magie règne en maître ici, et qui dit magie dit... Ben magie, donc je vais trouver une formule et tout rentrera dans l'ordre. Et puis je veux aussi combattre l'apocalypse. Après tout, si je ne peut pas repartir, je devrai bien vivre ici. Et puis même si ce ne sont pas mes vrais papas, ils le sont quand même un peu. Alors je dois les protéger. Quant au fait que mon espérance de survie en pleine apocalypse démoniaque soit de 10 minutes si le monstre qui m'attaque est aveugle en fauteuil roulant à pneus carrés, et bien soit. On meurt tous un jour. Mourir pour retrouver ma famille, ma foi c'est une raison qui me va. Mourir pour lutter contre le mal aussi. Enfin je crois. C'est peut être ma légère tendance à céder au désespoir qui parle en moi.

Je reste plantée là, immobile, concentrée, tandis que Jack feuillette mon livre. J'intègre les informations. Enfin je crois. Un grimoire familial. Des mythes japonais. De la magie. Une vie très longue. Une sagesse infinie. Je suis sonnée. Et en même temps, je suis soulagée : je n'ai pas l'air d'être un truc dangereux. J'suis pas une méchante. Il me rend le livre, et je le saisi en le regardant machinalement. C'est bizarre ça... Je n'ai aucun mal à le lire. Je comprends chaque mot. Je n'y ai pas réfléchis mais j'ai lu la page de garde après tout. Bon. Soit je parle le mandarin sans le savoir, et ça j'en doute ; soit le bouquin est magique, et ça ne me surprends même pas. Après tout, c'est un livre de famille. Je n'ai pas besoin de le formuler à voix haute, Jack à déjà prit la parole :

En effet, le fait que tu sois de la lignée te permet d'ouvrir le livre. Il doit aussi permettre que tu comprennes ce qu'il y est inscrit.

C'était très gentil de ta part de proposer de faire traduire le livre.

Ma voix est douce, mais parler me fait presque mal à la gorge. Je me sens étrangement calme.  J'ai un début de réponse. J'ai un moyen pour le comprendre. C'est parfait. Enfin parfait... J'suis un être surnaturel dont les personnes les plus érudits en matière de bizarreries surnaturelles n'ont pas l'air d'avoir entendu parler. Je dois parler à mes presque papas. Je vais aller les voir directement en partant d'ici. Je dois savoir si l'autre Alice avait des pouvoirs, et qui est notre mère. Puis la retrouver. Elle pourrait me conseiller pour...

Oh.

Je soupire tandis que de stupides larmes montent à mes yeux 

Evidemment. Si ce livre est arrivé ici, c'est qu'elle est morte.

Une vague de tristesse m'envahit. Et en même temps, je me sens être encore plus déterminée. Je sais que ma presque mère est morte, mais ça veut pas dire que la mienne l'est. Je le chercherai quand je serai rentrée chez moi. Ça m'inquiète un peu, très égoïstement, mais je veux croire que le grimoire suffira pour le moment. Et puis le plus important c'est que je maîtrise la base, le reste pourrait attendre que je sois chez moi. Si seulement je savais comment rentrer chez moi. Le reste du plan, c'est survivre à l'apocalypse de ce monde. Et rien que ça, ça m'a l'air mal barré. Je respire profondément, lentement.

Merci beaucoup pour le livre. Vous n'imaginez pas ce que ça représente pour moi.

Je me racle discrètement la gorge et me lève en enchaînant.

Je ne veux pas abuser de votre temps. Je me doute que vous avez beaucoup à faire, et je m'en voudrai d'être le poids mort qui vous empêche d'avancer.

Le livre serré contre mon torse, je me force à leur adresser un semblant de sourire.

J'ai toujours eu du mal à cerner les gens. Je veux dire, je ne suis pas super forte pour ce qui est de décrypter leurs avis et sentiments en me basant sur leurs expressions. Pourtant, tandis que j'écoute silencieusement Dakota parler d'une certaine Morrigan, je jurerai qu'il n'est pas super emballé par l'idée. Un frisson instinctif me parcourt l'échine, et, tandis qu'il m'a rejointe et qu'il m'assure que je peux compter sur lui, je sens une foule d'émotions me traverser. La reconnaissance, la peur, la fatigue, l'espoir... Je respire profondément l'air marin, sentant la brise légère faire virevolter mes cheveux.

Concernant ton amie, ce n'est pas la peine de la déranger pour moi. Si j'ai bien compris, je ne suis ni assoiffée de sang, ni contagieuse, ni dangereuse. Je vais étudier ce bouquin pour comprendre, mais je suis rassurée. Je veux dire... Il y a plus urgent que de comprendre le pourquoi du comment de mon héritage maternel. C'est la fin de ce monde, et je ne peux pas croire que tous les autres mondes impliqués disparaissent. Ça n'a pas de sens. Enfin si, mais il est possible aussi qu'ils ne soient pas impactés, non ? Peut être que mes pères sont fous d'inquiétude et remuent ciel et terre pour me retrouver. Si je veux les revoir, alors je dois trouver un moyen d'inverser la magie qui a précipité l'apocalypse ici.

Je marque une pause, les yeux perdu dans l'océan face à moi. Je sens les larmes monter jusqu'à mes yeux, mais je les retiens, refusant de pleurer encore, je ne suis plus une petite fille après tout.

Le seul truc, c'est que moi, j'suis rien. J'suis pas importante ou érudite comme toi, je suis pas magique. Et tu dis qu'on a face à nous des cavaliers de l'apocalypse et des dieux. Et pas n'importe lesquels, c'est pas tombé sur le dieu du rock ou des lapins de Pâques, mais sur celui de la guerre et celui de la mort. Si je dois être honnête, au rythme où vont les choses, je n'ai aucune chance de survivre ici.

Je le regarde dans les yeux, et la compassion que je lis dans les siens, sa sincérité, et sa gentillesse menacent grandement mon self contrôle sur le torrent d'eau qui grossi derrière mes paupières. Je reste un moment à le regarder, profitant du premier vrai regard rempli de bonté que je croise ici bas. Il a l'air tellement... Gentil. Et pourtant il me semble aussi fatigué. Comme si il portait un tas de responsabilités sur les épaules, et que leur poids était trop lourd à porter.

J'ai peur Dakota. Mais je ne peux pas laisser cette peur prendre le dessus tu comprends ? Je dois en faire un moteur si je ne veux pas que ça se finisse mal. Je ne m'attendais pas à rencontrer quelqu'un d'aussi gentil que toi. Tu ne me connais pas, mais tu me propose ton aide, alors que tu porte déjà un lourd fardeau. C'est évident que t'as une tonne de responsabilités, ça se lit dans ton regard, et malgré ça tu me propose ton épaule pour pleurer et ton temps. Ce n'est pas à toi de me proposer ton aide Dakota, c'est à moi de t'offrir la mienne. Je n'y arriverai jamais seule, et nous semblons poursuivre le même but. Alors je sais que je ne suis ni une dure à cuire comme ta sœur, ni capable de me battre comme son mec trop flippant, ni de magie comme Jack. Je n'ai que mon envie de t'aider à te proposer. Mais si tu l'acceptes, je serais ravie de te filer un coup de main et de faire des recherches pour toi, ou avec toi. Je ne veux pas te ralentir mais sans me vanter en ce qui concerne les recherches et les textes anciens je peux aider.

Je lui offre un tout petit sourire, les mains crispées sur le livre que je tiens contre ma poitrine comme une bouée de sauvetage. Et malgré mon tourment intérieur, malgré tous mes doutes et l'étrangeté de ma situation, le regard qu'il me rend m'apaise. Comme si j'avais enfin un repère. Mes collègues, mes faux papas, tous me rappelent que je n'ai rien à faire ici. Quant à Andréas, je préfère ne pas y penser. À l'idée que j'ai pris un verre dans un bar remplis de démons et que j'ai attiré l'attention d'un dieu, je sens ma gorge se resserrer. Évidemment qu'il est beau à se damner, il est divin nom d'un chien ! Je sens mon cœur battre plus vite, il est hors de question que je laisse Andréas me perturber plus que nécessaire.

Lorsque Dakota me fait part du service qu'il attend de moi, je sens comme un coup en plein estomac, et mon souffle fait douloureux, tandis que mon rythme cardiaque s'accélère encore. Andréas. Le dieu tombeur de culottes que le campus à surnommé "Appelles moi". Le bad boy. Le dieu de la guerre qui m'emmène boire des cocktails et m'abandonne pendant l'un des moments les plus terrifiants de ma vie. Je sais qu'il est ridicule de la part de ressentir son départ de chez moi comme un abandon, mais au point où j'en suis, je ne suis plus à un illogisme près. Quelle ironie que Dakota me demande de le contacter alors que je peine à me convaincre que je dois rester loin de lui. Est ce que c'est le destin qui tente de faire de l'humour ? Andreas est un dieu, et moi je suis juste une fille, rien qu'une étudiante ordinaire. Comment pourrais je avoir de l'influence sur lui, alors qu'il lui suffit de me regarder pour que mon pouls s'emballe ? Je regarde Dakota, et je lis dans ses yeux un espoir lié à une volonté farouche. Comment lui refuser ce service, alors qu'il ne veux que sauver le monde ? Je ne peux tout simplement pas lui refuser ce service. Mais avant, je dois en savoir plus. Je repense à la sœur de Dakota et le psychopathe qui lui sert de mec, et je déglutis difficilement.

Je... Euh...oui je peux faire ça pour toi oui mais... J'ai quelques questions d'abord. Avant toute chose, est ce que tu peux me garantir que c'est pas un piège et que personne ne s'en prendra à lui si jamais il vient ?

Je croise le regard étonné de Dakota, et me retrouve à béer de surprise face à la première question qui sort de ma bouche. Dans ma tête, je voulais lui demander si Andréas peut être dangereux pour nous, et ce qui sort c'est une crainte pour lui alors que bon sang, c'est un dieu !!! Alice ma fille, ressaisi toi immédiatement, tu es ridicule.

Euh... Je sais qu'il est super fort et tout, et je sais que t'es sincère mais... Est ce que tous tes amis le sont ? Je penses par exemple au mec de ta frangine qui me semble euh.... Ben flippant. Est ce qu'il représente un danger pour Andréas ou.... Pour moi? Attends, je penses à un truc mais quand tu dis "organiser une rencontre" c'est juste passer un coup de fil ou c'est vous accompagner ? Et est ce que tu as confiance en lui ? En Andreas je veux dire. Je sais pas si... Je suis.... Euuuuh.... Perdue en ce qui le concerne.

J'ai l'impression de m'enfoncer de plus en plus dans le sable tandis que je parles, comme si mon corps se rapetissait tandis que je bafouille de plus en plus.

J'écoute attentivement Dakota sans l'interrompre. Je ne suis pas soulagée de savoir que j'ai vu juste au sujet de Spike. Même si je n'ai pas l'impression que la sœur de Dakota soit en sécurité avec lui. Oh bien sûr, s'il s'agit de la défendre, alors elle n'a aucun soucis à se faire. Mais s'il s'agit de prendre soin d'elle hein ? Et puis, si jamais elle l'énerve un jour où il aura mis les crocs sur le mauvais groupe sanguin ? Il ne me semble absolument pas assez équilibré pour....

Attendez.... Qu'est ce qui me prend tout à coup ? Pourquoi je pense des trucs pareils alors qu'au fond je ne le connais absolument pas moi ce taré. Enfin ce type. C'est vrai quoi, qui je suis pour juger ? Je me sens rougir de honte. Depuis quand je condamne quelqu'un sans même avoir pris la peine d'avoir une conversation avec lui ? Bon d'accord, à l'idée d'une conversation en tête à tête avec le grand blond j'ai la chair de poule et envie de déguerpir à toutes jambes, mais c'est parce qu'il me fait peur. Mais je ne le connais pas. Peut être que sous ses airs de gros psychopathe... Je veux dire de gros dur il est effectivement adorable avec Faith. Mouais... Bon Alice, il ne sera pas là, elle non plus, passe à autre chose.

Je réfléchis aux paroles de Dakota sans le quitter des yeux, essayant de lire la moindre trace de mensonge ou de fourberie dans son expression. Mais rien. Enfin pas rien rien, je lis de l'attente patiente et de l'espoir, mais pas de retournement sheakspearien en vue. Je ne sais pas si j'ai envie de me retrouver en présence d'Andréas, mais ma décision est déjà prise. J'y serai. Quant au lieu, rien de plus évident. Alors j'inspire un grand coup, souffle tout par la bouche et dégaine mon téléphone. Sans plus réfléchir, j'appelle Andréas. Allé Alice, te voilà promue négociatrice. Ne pense pas que c'est dieu. C'est juste un type lambda. Ouais. D'ailleurs c'est bien connu qu'on demande à des étudiantes de 19 ans d'être l'intermédiaire entre un type lambda et d'autres types lambda pour vaincre une foutue apocalypse lambda. Mais avant de pouvoir paniquer d'avantage je tombe sur la messagerie d'Adréas.

Euuuuuh.... Sa...salut. C'est moi. Enfin Alice. Du campus. Celle à qui t'as filé une gamelle de flotte pendant qu'elle était un renard. Moi quoi. Alors euuuuh...

Nom d'un chien Alice, reprends toi bon sang !!!

Voilà, je suis avec Dakota. Il aimerai te rencontrer avec des amis... Ah non un ami seulement si j'en crois le signe qu'il m'adresse. Il m'a demandé d'organiser une rencontre entre vous. Alors je voulais savoir si t'étais d'accord. Vous pourriez... On pourrait se retrouver au centre commercial ? Je crois que c'est l'endroit idéal pour une discussion disons sans violence. Même si à mon avis ça fait un peu mafieu le côté "lieu public et neutre". Seigneur, t'es quand même pas un dieu mafieu, si ? Remarque ça collerai avec le reste.... Eeuuuuuuh.....qu'importe. Je... Dakota ça va ?.... Ben quoi, pourquoi tu me regardes comme ça, on dirai que je viens d'insulter ta grand mère, j'ai dis une bêtise ? Attends... Où j'en étais ? Ah oui ! Donc on pourrai tous se retrouver pour discuter. Au centre commercial. D'ici quelques jours. Si tu es d'accord, rappele moi et on organisera tout ça. Oh, et merci pour hier soir....je crois. Voilà j't'ai tout dis. À plus !

Je raccroche le téléphone, et jete un coup d'œil inquièt à Dakota. J'ai l'impression que je n'ai pas été super brillante avec ce message, alors que ce n'est rien de plus que ça... Un message. J'a pas pu foirer ça si ?

Les paroles de Dakota m'arrachent une grimace horrifiée.

Pas une pluie de sauterelles, par pitié. J'ai encaissé beaucoup de choses ces derniers temps, mais si des bestioles pleines de pattes et de trucs de bestioles me tombent dessus, j'abandonne.

Je frissonne violemment. Je trouve que je fais vraiment bonne figure face à l'adversité, mais chaque fille a ses limites. Les bestioles c'est non. Je soupire, et regarde Dakota.

Y'a plus qu'à attendre pas vrai ? Je veux dire.... Sur ce point. Est ce que y'a autre chose que je puisse faire pour aider ? Traduire des textes, faire des recherches, monter un plan, construire une arche et partir très vite d'ici ?

Je tente l'humour, mais je suis quand même à moitié sérieuse. Une part de moi à toujours envie de décamper de ce monde à toute vitesse. Mais il semblerai que le quitter implique de le sauver. Alors hauts les cœurs ! Du moment que je laisse le mien bien à l'abri. Je ne dois pas trop m'attacher où trop compter sur les autres déjà parce que notre espérance de vie diminue à chaque pas que fait l'apocalypse, mais surtout parce qu'ils ne sont pas de mon monde. Alors ça suffit de rêvasser dès que le nom du dieu est cité. C'est un dieu nom de.... Euuuhhhh..... C'est un dieu. Super vieux. De la guerre. Pas du tout le genre de garçon que j'ai envie de ramener à mes papas, qu'ils soient vrais ou pas. Et puis de toute facon je ne suis qu'un grain de sable sur sa plage. Et puis il ne m'intéresse pas. C'est juste qu'il me perturbe. Mais ça s'arrête maintenant, c'est décidé.

Mince, je n'ai pas entendu si Dakota m'a répondu, j'étais perdue dans mes pensées. Oh la honte. C'est officiel : Je suis atteinte de TADA : Troubles de l'attention Dû à Andréas. Je me racle alors la gorge, bien décidée à mettre le dieu de la guerre aux oubliettes.

Excuses moi, j'étais dans mes pensées je ne t'ai pas écouté. Tu disais ?

Je ne peux m'empêcher de ricaner amèrement aux mots de Dakota.

La dernière fois que j'ai voulu sortir je me suis retrouvée dans un repère de démons à me saouler avec un dieu avant de me transformer en renarde sans rien comprendre. Je crois que j'en ai assez fait côté tentative de normalité.

Je hausse les épaules, un brin fataliste. Ce que je ne dis pas à voix haute, ce que je refuse de formuler même pour moi, c'est que cela me paraît surtout impossible. Accepter de me détendre, de prendre du bon temps, c'est comme accepter d'être loin de chez moi. C'est renoncer à essayer de rentrer chez moi pour vivre la vie d'une autre. Ce que je veux, c'est changer de monde et retrouver le mien ou y'a pas de transformation en renard, d'apocalypse et de démons meurtriers et maniaques.

Je soupire. C'est pas la faute de Dakota, lui il essaye de m'aider, je ferais mieux de ne pas l'oublier. Alors je me compose un sourire, me forçant de paraître aussi enjouée que de coutume, et je m'adresse à lui d'une voix contrite.

Désolée. Je ne voulais pas être désagréable, je n'ai pas à passer mes nerfs sur toi.

Je relativise rapidement en me disant que je ne dois pas être celle dont il doit le plus craindre la mauvaise humeur, et encore une fois je pense au vampire. Quelque chose en moi se hérisse à chaque fois que je pense à lui, c'est physique, j'ai les poils qui se dressent. Peut être est ce mon côté renarde qui me met en garde. Ceci dit je n'ai pas forcément besoin de ça pour savoir que ce type me flanque une trouille de tous les diables, et que pour rien au monde je ne resterai en tête à tête avec lui. Ceci dit, on ne me le demande pas, et c'est plutôt pas mal.

Tu as raison. Je vais y aller, je crois que j'ai besoin d'être seule et de découvrir ce que ce bouquin raconte. Et très honnêtement, j'aimerai rentrer avant la nuit.

Je prends rapidement congé de Dakota qui me raccompagne en souriant, inconscient que ma réticence a rentrer lorsque le soleil est couché me vient tout droit de son beau frère. Savoir que des êtres tels que lui traînent les rues ça me donne la nausée. Je lui promets de l'appeler dès que j'ai des nouvelles d'Andréas, et part d'un bon pas jusque chez moi. Je renonce à remonter dans le métro, sentant la crise d'angoisse menacer de me submerger, alors je marche pendant une heure, perdue dans mes pensées, mon sac serré autour de moi. Arrivée à la maison, mon masque se fissure et je me retiens de pleurer. Je n'ai aucune raison de me faire, mais j'ai l'impression d'étouffer sous un gros chagrin. Sauf que ce n'est pas du chagrin mais de la peur. Et je ne peux pas me permettre d'avoir peur, pas dans ce monde, pas dans cette vie. Je sursaute quand mon téléphone sonne. C'est Ben, qui m'invite à manger avec lui et Jerry demain. Alors que je m'apprête à décliner, réticente, je repense aux paroles de Dakota. Après tout.... Je le sens heureux à l'autre bout du fil. J'ai comme l'impression que mes faux papas ont hâte de me voir, ce qui m'étonne. Mais à chaque jour suffit sa peine, je verrai bien demain. En attendant, je me fais un thé et me love dans un fauteuil, le livre des Kitsunes sur les genoux. C'est parti.